Overblog
Editer l'article Suivre ce blog Administration + Créer mon blog
21 juillet 2021 3 21 /07 /juillet /2021 15:38

"Kairos, l'opportunité, l'occasion, l'instant présent .. 

On le peignait sous la figure d'un éphèbe revêtu d'une tunique, équipé de deux ailes aux talons et deux ailes dans le dos, symbole de la vitesse et de la furtivité de son passage, le front couvert d'une tresse de cheveux et l'arrière du crâne dégarni. Les poètes grecs déclaraient qu'il fallait saisir l'occasion par les cheveux.

Machiavel décrit la "Fortuna" avec des traits étrangement ressemblants au Kairos des Grecs : "Je suis l'Occasion, et bien peu me connaisse : et ce pourquoi je ne cesse de m'agiter, c'est que je tiens un pied sur la roue [...]. Je ramène devant moi tous mes cheveux flottants et je dérobe sous eux ma gorge et mon visage pour que les hommes ne me reconnaissent pas quand je me présente. Derrière ma tête, pas un cheveu ne flotte et celui qui m'aurait laissée passer, se fatiguerait en vain à me rattraper" N. Machiavel, Capitolo de l'Occasion.

Kairos est comme l'écrit Jean-Luc Nancy (la pensée dérobée) "le moment favorable dont la faveur consiste à s'offrir seulement à celui qui s'expose au-dehors .." Kairos est l'art de se laisser disposer à l'événement. Kairos (l'art de "saisir l'incalculable dans le règne du calcul" : il n'y a là aucune opération magique, mais la révélation de ce qui fait événement dans l'époque. Kairos se déroule en dehors de toutes mesures, de toute pesée de valeurs (au sens où une action morale évaluerait toujours le pour et le contre) car il est à la rencontre avec le réel tel qu'il s'offre à l'humain.

Kairos, insiste, appuie sur la faille, ouvre la blessure, celle de l'inhumain dans laquelle nous vivons, celle de l'immonde."

Extrait de Quelque chose en son fond résiste de Jean-Bernard Paturet 

Kairos le furtif, celui qui passe en silence à l'instant présent, ni avant, ni après, qui ne laisse aucune chance à celui qui ne sait pas saisir le cheveu qui dépasse. Ainsi Kairos pourrait se représenter encore et encore, toujours fugace et insister plus, et plus loin, ouvrir plus grand la faille, cisailler la blessure plus profondément encore .. jusqu'à ce que peut-être il soit enfin saisi !

La crise que nous traversons nous y engage urgemment.

 

Partager cet article
Repost0

commentaires