Ecrivain, Poète, Daniel Tammet est doté de dons exceptionnels pour le calcul mental et l’apprentissage des langues. Ce jeune autiste britannique témoigne de capacités incroyables du cerveau
humain : «Quand je fais une multiplication, je visualise les deux nombres et leurs deux formes distinctes. Puis l’image change. Une troisième forme apparaît : la réponse. Le processus
s’effectue de lui-même. » À 28 ans, ce Britannique est autiste, atteint du « syndrome savant » (Asperger). Comme le héros du film Rain Man, il est capable d’effectuer des calculs mentaux
très complexes en quelques secondes. Daniel Tammet a aussi le don des langues : il en parle onze, sans compter le mänti, un nouvel idiome créé par lui, inspiré du finnois et de l’estonien.
La clé de ces capacités hors normes tient en un mot : synesthésie, du grec syn (union) et aesthesis (sensation). Une condition neurologique rare par laquelle deux ou plusieurs sens sont associés.
Elle permet le plus souvent de voir mentalement les lettres et/ou les chiffres en couleur.
Il publie en 2007, "Je suis né un jour bleu" dont quelques extraits ci-dessous, en 2009 « Embrasser le ciel immense », un état des lieux des connaissances actuelles sur le cerveau.
Son troisième livre qui paraitra le 17 Janvier 2013 :« L´Éternité dans une heure », est un recueil d'essais abordant la magie des mathématiques.
Extraits Je suis né un jour bleu - Auteur Daniel Tammet
1ère phrase : Je suis né le 31 janvier 1979.
Dernière phrase : Ce serait un aperçu du paradis.
Ainsi que la plupart des individus qui souffrent du syndrome savant, je relève de ce qu'on appelle le « spectre autistique ». Je suis atteint du syndrome d'Asperger, une forme modérée du handicap qui en Grande-Bretagne affecte environ un autiste de haut niveau sur trois cents. Selon une étude de 2001 de la National Autistic Society, presque la moitié des syndromes d'Asperger ne sont pas détectés avant l'âge de 16 ans. Le mien a finalement été diagnostique à 25 ans, après des tests et un entretien au Centre de recherche sur l'autisme de Cambridge.
L'autisme, y compris le syndrome d'Asperger, se définit par l'altération des interactions sociales, de la communication et de l'imagination (surtout en ce qui concerne l'abstraction, la souplesse intellectuelle et l'empathie). Le diagnostic n'est pas facile et ne peut pas se faire par simple prise de sang ou scanner cérébral : les médecins doivent pouvoir observer le comportement d'un individu et étudier l'histoire de son développement depuis l'enfance.
Les personnes touchées par le syndrome d'Asperger se distinguent souvent par de bonnes aptitudes linguistiques et mènent une vie relativement normale. Beaucoup d'entre elles ont un QI légèrement supérieur à la moyenne et excellent dans des domaines qui impliquent la pensée logique et visuelle. Comme d'autres formes d'autisme, le syndrome d'Asperger affecte bien plus d'hommes que de femmes (environ 80 des autistes et 90 des personnes atteintes du syndrome d'Asperger sont des hommes). L'obstination, une forte tendance a se concentrer sur l'analyse des détails, ou encore la reconnaissance implicite des règles et des modèles qui organisent les systèmes sont des caractéristiques reconnues. Des dons particuliers dans les domaines de la mémoire, des nombres et des mathématiques sont courants. Personne ne sait pourquoi certains naissent avec le syndrome d'Asperger, et d'autres pas.
D'aussi loin que je me souvienne, j'ai toujours eu une expérience visuelle et synesthésique des nombres. Ils sont ma langue maternelle, celle dans laquelle je pense et je ressens. Par exemple, comme j'ai du mal à comprendre ou à réagir aux émotions des autres, j'ai souvent recours aux nombres pour y arriver. Si un ami me dit qu'il se sent triste ou déprimé, je m'imagine assis au creux de la cavité noire d'un 6, et cela m'aide à faire l'expérience d'un sentiment similaire et a le comprendre. Quand je lis dans un article qu'une personne a été intimidée par quelque chose ou quelqu'un, je m'imagine debout a côté du nombre 9.
Lorsque quelqu'un me décrit un bel endroit qu'il a visité, je me souviens de paysages numériques et de la manière dont ils me rendent heureux. C'est ainsi que les nombres m'aident à être plus proche des autres.
Parfois, les personnes que je rencontre pour la première fois me rappellent un nombre particulier, ce qui me met à l'aise. Quand elles sont très grandes, elles me rappellent le nombre 9 ; quand elles sont grassouillettes, le nombre 3. Si je me sens malheureux ou angoissé par une situation nouvelle (ce qui de fait me stresse et me met mal à l'aise), je compte. Quand je compte, les nombres suscitent des images et des formes solides et rassurantes dans mon esprit. Je peux alors me détendre et gérer la situation, quelle qu'elle soit.
J'ai toujours aimé penser à des calendriers, à cause de tous les nombres et de toutes les formes qui s'y trouvent. Chaque jour de la semaine suscite des couleurs et des émotions distinctes : les mardis sont de couleur chaude alors que les jeudis sont pelucheux. Le calcul calendaire - la faculté de dire a quel jour de la semaine correspond une date - est une capacité commune a beaucoup de personnes touchées par le syndrome savant. Cela est probablement dû au fait que les calendriers sont constitués de nombres prévisibles et d'un agencement de formes particulières selon les jours et les mois. Quel que soit le mois, le treizième jour est toujours placé, dans la semaine, deux jours avant le premier, excepté les années bissextiles. De plus, certains mois se répondent l'un l'autre, comme février et mars (le premier jour de février est le même que le premier de mars). Ainsi, quand la texture du premier jour du mois de février d'une année donnée est pelucheuse (jeudi), le treizième jour de mars sera de couleur chaude (mardi).
Dans son livre L'homme qui prenait sa femme pour un chapeau, l'écrivain et neurologue Oliver Sacks évoque le cas de John et Michael, des jumeaux atteints d'une forme lourde d'autisme. Ils représentent l'exemple extrême des capacités de calcul calendaire des personnes qui souffrent du syndrome savant. Bien qu'incapables d'être autonomes (diverses institutions les ont pris en charge depuis l'âge de 7 ans), les jumeaux peuvent calculer le jour de la semaine correspondant à n'importe quelle date des quarante mille dernières années."